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Record français. Joseph CHINARD (1756-1813) « L'Innocence sous la forme d'une colombe se réfugiant dans le sein de la Justice ». (Lot 121 de la vente du 13 juin 2012) Statuette en terre cuite représentant une jeune femme drapée à l'Antique symbolisant la Justice, tenant un glaive, une balance et un bouclier qui protège une colombe échappée. Inscriptions gravées "Justice" sur la garde du glaive, "Tremblés coupables" sur la lame, "Espérés innocents" sur le fût de colonne, "Par un prisonnier, 25 pluviose" sur la base, et "Je rends à la vertu sa première blancheur, Et j'immole à ses yeux son farouche oppresseur" sur la plinthe. H. : 44 cm. Prov. : - collection Francis Mallet-Guy. - collection Marius Paulme, Galerie Georges Petit, vente du 15 mai 1929, n° 275, planche 179. Nous reprenons intégralement le commentaire de G. B. Lasquin, expert lors de la vente Marius Paulme: « Cette statuette présente le grand intérêt de marquer une date dans la vie assez mouvementée de l'artiste pendant la tourmente révolutionnaire. À la fin de 1791, étant à Rome où il séjournait pour la seconde fois, il fut dénoncé comme auteur d'œuvres injurieuses à l'égard de la religion, arrêté dans la nuit du 22 au 23 septembre 1792 et enfermé au fort Saint-Ange avec un de ses amis, l'architecte Ratter. À la suite des demandes de sa femme, du peintre David et de Madame Roland, le Gouvernement français fit remettre les deux amis en liberté. Ils furent, après deux mois de détention, relâchés le 13 novembre 1792 et durent quitter Rome aussitôt. À son arrivée à Lyon, Chinard s'adonna entièrement aux idées nouvelles, et cependant, malgré son zèle révolutionnaire, il fut accusé de modérantisme. Ses dernières oeuvres prêtèrent à la critique des plus exaltés. On lui reprochait des intentions et des allusions antipatriotes; bref, Chinard, qui avait été emprisonné à Rome comme révolutionnaire, fut arrêté à Lyon, en octobre 1793, sous l'accusation d'avoir des tendances modérées et contrerévolutionnaires. En prison, ayant pu se procurer de la glaise, il modela les médaillons de ses codétenus et exécuta l'allégorie ci-dessus décrite. Il fit offrir, paraît-il, cette statuette à André Corchand, un des membres les plus redoutés de la Commission révolutionnaire devant laquelle il comparut le 22 février 1794. Soit que son oeuvre lui ait attiré la bienveillance de ses juges, soit que les accusations portées contre lui n'aient pas paru suffisamment sérieuse, il fut acquitté." Cette terre cuite s'inscrit parfaitement entre La Liberté (Musée Carnavalet, S 564), elle aussi exécutée en prison par Chinard, et La liberté couronnant le peuple français (Musée Carnavalet, S 926) réalisée juste après sa libération. »