BAUDELAIRE (Charles).

Manuscrit autographe intitulé « Pour la guerre civile » avec la suscription « Poèmes en prose ». Très beau Petit poème en prose. « Le canon tonne... les membres volent,... des gémissements de victimes et des hurlements de sacrificateurs se font entendre..., c'est l'Humanité qui cherche le bonheur. » Baudelaire publia ses premiers poèmes en proses en 1855, et l'ensemble fut réuni sous le titre Spleen de Paris dans le quatrième volume des OEuvres complètes donné par Lévy en 1869. Si les Fleurs du mal constituent le premier recueil de la poésie moderne, elles représentent également l'aboutissement d'une tradition poétique plusieurs fois séculaire et qui remonte à Dante, à Pétrarque et à Ronsard. C'est sans doute en préparant la deuxième édition des Fleurs du mal (1861) et, surtout en composant les grands poèmes qui forment l'essentiel des « Tableaux parisiens » que Baudelaire prit conscience des limites que lui imposait la poésie versifiée. « Le Cygne », « Les Sept vieillards » et « Les Petites vieilles » évoquent la réalité quotidienne de la capitale sur un ton qui diffère sensiblement du « Crépuscule du soir » et du « Crépuscule du matin », composés près de dix ans plus tôt : le vocabulaire est plus varié, certains vers se rapprochent de la prose. Mais face à un monde nouveau, voué au culte du progrès, il faut une poésie nouvelle. Baudelaire essaya alors d'indiquer une autre voie, radicalement nouvelle, en créant un genre littéraire que la poétique traditionnelle, fondée sur la distinction entre prose et vers, n'avait pas prévue : le petit poème en prose. Le présent poème en prose figure à cet égardcomme un parfait exemple des dernières orientations du génie poétique de Baudelaire. Baudelaire, OEuvres complètes, La Pléiade, 1990, t. I, « Reliquat du Spleen de Paris », « Plans et notes », n° B, p. 371. Provenance : collection Armand Godoy. Le poète et traducteur d'origine cubaine Armand Godoy (1880-1964) fut un grand bibliophile et collectionneur d'autographes, notam